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UN PREMIER ARRÊT DE LA CHAMBRE COMMERCIALE DU 7 JUILLET 2023 DANS LES CONTENTIEUX AGS

Mis à jour le : 15 décembre 2023

Depuis 4 ans, le CNAJMJ s’est mobilisé pour répondre aux théories juridiquement farfelues et aux dénonciations calomnieuses dont la profession a été l’objet.

Deux théories ont été soutenues, également dommageables au bon déroulement des procédures et à la protection des salariés.
La première, la théorie de la subsidiarité, a été sèchement et définitivement écartée le 7 juillet 2023 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation, confirmant l’obligation pour l’AGS de verser les avances de salaires à première demande du mandataire judiciaire en cas de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire : « l’obligation de justification préalable par le mandataire judiciaire de l’insuffisance des fonds disponibles de la procédure collective et la possibilité de sa contestation immédiate par les institutions de garantie ne sont prévues qu’en cas de sauvegarde et en a déduit qu’en dehors de cette procédure, aucun contrôle a priori n’est ouvert à l’AGS, de sorte que, sur la présentation d’un relevé de créances salariales établi sous sa responsabilité par le mandataire judiciaire, et afin de répondre à l’objectif d’une prise en charge rapide de ces créances, l’institution de garantie est tenue de verser les avances demandées ».

Dans cet arrêt (n°22-17.902) d’une portée si grande qu’il a fait l’objet tout à la fois d’une publication au Bulletin, d’une publication au Rapport et d’un communiqué de presse, la Cour de cassation rappelle que l’obligation de justification préalable de l’insuffisance des fonds disponibles n’est prévue qu’en cas de procédure sauvegarde de sorte que l’AGS est infondée à en demander la généralisation.
Le pourvoi de l’UNEDIC AGS dans laquelle celle-ci prétendait invoquer la subsidiarité de son intervention ainsi qu’un curieux « droit propre à contester le principe et l’étendue de sa garantie » se trouve logiquement rejeté.

Il s’ensuit qu’en dehors de la procédure de sauvegarde, aucun contrôle a priori ne saurait être reconnu à l’AGS : sur présentation d’un relevé de créances salariales établi sous sa responsabilité par le mandataire judiciaire, et afin de répondre à l’objectif d’une prise en charge rapide de ces créances, l’institution de garantie est tenue de verser les avances demandées.
Cette décision de la chambre commerciale constitue au premier chef une victoire pour les salariés des entreprises en difficulté, qui ont retrouvé la certitude d’être payés promptement de leur dû, comme c’est leur droit le plus élémentaire.

Sur la seconde théorie, celle d’un droit de l’AGS d’être remboursée sur les premiers fonds disponibles et donc au détriment du financement des procédures elles-mêmes, on retiendra à ce stade qu’une décision de la Cour d’appel de Paris du 6 juillet 2023, a confirmé que si l’article L.3253-14 du Code du travail « ne prévoit aucune limitation des effets de la subrogation, néanmoins il convient de l’articuler avec l’article 1346-4 du code civil qui dispose que « La subrogation transmet à son bénéficiaire, dans la limite de ce qu’il a payé, la créance et ses accessoires, à l’exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier. ».
Or le paiement immédiat de la créance salariale est un droit exclusivement attaché à la personne du salarié. En effet, le paiement rapide des salaires étant indispensable à sa survie, revêt un caractère alimentaire.

Il s’ensuit que l’Unedic AGS, malgré la subrogation dont elle bénéficie, ne peut, en procédure de liquidation judiciaire, obtenir le paiement immédiat de sa créance, avant la répartition des fonds entre les différents créanciers, selon leur rang, sauf dans l’hypothèse où le juge-commissaire autorise un versement en application de l’article L.643-3 du code de commerce. (…) la subrogation au bénéfice de l’Unedic AGS, ne lui permet pas d’obtenir le paiement des salaires dont elle a fait l’avance, au motif que ce droit au paiement immédiat est un droit personnel attaché à la personne du salarié, l’UNEDIC AGS sera déboutée de sa demande (…) ».
Saluée par une doctrine autorisée (J. Théron, Le droit au paiement immédiat exclusivement attaché à la personne du salarié, la limite à la subrogation de l’AGS, D. 2023, p 1605), cette solution est conforme à la lecture qui en a toujours été faite par la profession, tout comme l’AGS, depuis sa création et jusqu’à son revirement de 2019.

Est-il besoin de rappeler que le droit au paiement sur les premières rentrées de fonds est un dispositif dérogatoire qui, justifié par son caractère alimentaire au profit des salariés, remonte à une époque où l’AGS n’existait pas encore (article 51 loi 13 juillet 1967), de sorte qu’il ne pouvait être question de l’en faire bénéficier ?

Nous avons foi dans la capacité de la chambre commerciale de la cour de cassation, qui se positionnera le 17 janvier 2024, à placer les intérêts des salariés au premier plan et à restaurer les équilibres nécessaires à l’efficacité des procédures collectives.